• Fumisterie

    Tout se passe (malheureusement) comme prévu. Grâce aux importantes baisses de "charges" liées au pacte de responsabilité, les profits des entreprises se redressent rapidement : début 2013, selon l'Insee, elles ne dégageaient que 28 % de marges une fois payés salaires et fournisseurs, un niveau très bas ; début 2015, ce taux était remonté à 31 %, 34 milliards de profits en plus par an.

    Seulement voilà, ce gain a pour contrepartie une stricte austérité budgétaire. Du coup, la consommation des ménages est en berne. La forte baisse du pétrole avait certes relancé un peu la machine début 2015, mais dès que son prix s'est stabilisé, la stagnation a repris. D'autant que, inquiets pour l'avenir, du fait du chômage et de la remise en cause de la protection sociale, les Français préfèrent mettre de l'argent de côté.

    Les comptes extérieurs reviennent certes à l'équilibre, mais surtout parce que les importations stagnent : grâce à la baisse du coût du travail, les exportations se redressent un peu, mais comme tous nos voisins mènent des politiques similaires et que les pays émergents ne se portent pas bien, cela reste très limité. Comme la demande n'est pas au rendez-vous, les entreprises investissent elles aussi très peu malgré leurs profits en hausse.

    Moyennant quoi, malgré un pétrole à 50 dollars le baril, un euro qui a presque retrouvé sa parité avec le dollar, des taux d'intérêt historiquement bas et une banque centrale qui fait tourner à fond la planche à billets, l'économie française fait du surplace et le chômage ne descend pas. Un exploit ! On (re)découvre une fois de plus que les politiques de l'offre ne marchent pas et que le "théorème de Schmidt" est une fumisterie : les profits d'aujourd'hui ne sont pas les investissements de demain ni les emplois d'après-demain.

    Que faire ? Chercher bien sûr à infléchir, enfin, les politiques européennes responsables de cette orientation mortifère, mais aussi dans l'immédiat donner la priorité aux principales victimes de la crise, en n'hésitant pas notamment à recourir massivement aux emplois aidés et au partage du travail pour limiter la désespérance sociale, mère de toutes les régressions.

    Guillaume Duval
    Alternatives Economiques n° 349 - septembre 2015
     
    couverture
    Faut-il en finir avec l'euro ?
    septembre 2015
    « Régionales, réponse des groupes bretons d'Ensemble et du PCF à la lettre du Parti de Gauche.Les naufragés du libre-échange De l'OMC au Tafta »
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